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WAN © 2012

ԱՐԵՒՄՏԵԱՆ ՀԱՅԱՍՏԱՆ

    19 Փետրուար  2012 թ,                                               Conseil Constitutionnel

Questions – Réponses

 

avec Maître Philippe KRIKORIAN

 WAN : Monsieur Philippe KALFAYAN avance dans son dernier article (http://www.huffingtonpost.fr/philippe-kalfayan) selon lesquelles les griefs d'inconstitutionnalité de la loi n°2001-70 du 29 Janvier 2001, pris isolément, seraient fondés.

Sur la constitutionnalité de la loi de 2001

« Ainsi, le Pr Chagnollaud serait heureux d'apprendre que ni les sénateurs, ni les députés, n'ont dans leurs saisines respectives contre la loi Boyer expressément soulevé le moyen d'inconstitutionnalité de la loi de 2001. Les allégations d'inconstitutionnalité de la loi de 2001, prise isolément, seraient fondées. En effet, la loi de reconnaissance du génocide arménien de 2001 est purement déclamatoire et n'a pas de portée normative. Le parlement ne peut qualifier juridiquement un génocide; il peut simplement en reconnaître politiquement son caractère notoire. »

Réponse de Maître Philippe KRIKORIAN :

Je ne puis, à cet égard, que m'inscrire en faux.

En effet, comme je l'ai établi à maintes reprises dans mes différents recours et publications, la loi par laquelle "La France reconnaît le génocide arménien de 1915" est parfaitement normative: elle établit juridiquement le fait imprescriptible, le qualifie de génocide, conformément au Code pénal et le rend opposable à toutes les personnes relevant de la juridiction de la France.

 L'invocation, ici, de l'article 69, § 6 du Statut de Rome ( Cour pénale internationale ) relatif aux faits "notoires" n'est pas pertinente puisque ce texte ne concerne que la preuve des faits de la compétence de la CPI ( génocides, crimes contre l'humanité, crimes de guerre ), qui auraient été commis à compter du 1er Juillet 2002, ce qui n'est pas le cas des faits de 1915 dont les auteurs disparus ne peuvent, aujourd'hui, être déférés devant aucune juridiction.

 Cependant, comme le juge la Cour internationale de justice (CIJ, 26 Février 2007, Affaire relative à l'application de la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide - Bosnie-Herzégovine c. Serbie-et-Monténégro, n°91, §§ 148 et 149, p. 56 ), "Le fait qu'une telle cour ou un tel tribunal n'existe pas ne signifie pas que les obligations n'existent pas. ( … )" (arrêt cité dans la requête en récusation du 04 Février 2012, p. 42/71). 

 Il est vrai que dans son arrêt du 12 Décembre 2007 le Tribunal fédéral suisse a reconnu que le Génocide Arménien faisait l'objet d'un consensus notamment scientifique.

 Cependant, le principe de légalité des délits et des peines nécessite, en France, que le délit consistant à contester l'existence d'un génocide soit suffisamment défini (qualités de prévisibilité et d'accessibilité de l’incrimination). Cela implique nécessairement que le crime contre l'humanité susceptible de négationnisme soit clairement identifié. Le critère de la reconnaissance par la loi satisfait  à cette exigence du procès équitable.

 La thèse du Conseil constitutionnel relative à la normativité de la loi est radicalement anti juridique et doit être combattue selon les voies de droit. C'est cet objectif que s'assigne la requête en récusation des membres du Haut Conseil à laquelle il convient d'assurer la diffusion la plus large possible auprès du public.

 WAN : Nous avons cru comprendre que certaines organisations en France dans un appel urgent du 03.02.2012 au boycott de la procédure du Conseil National Arménien, ayant pleinement confiance dans les institutions de la République, et notamment dans les juges du Conseil Constitutionnel seraient prêtes à saisir la Cour Européenne des droits de l’Homme au cas où la loi serait déclarée inconstitutionnelle et Monsieur Arménag APRAHAMIAN a déclaré que pour saisir la CEDH et accéder à la recevabilité du recours, il était nécessaire de saisir toutes les voies de recours internes en France, qu’en pensez-vous ?

Réponse de Maître Philippe KRIKORIAN :

C'est tout le problème de l'amateurisme de la part de ces organisations !

 En tout état de cause, la procédure est nécessaire, dans la perspective d'une prochaine saisine de la Cour européenne des droits de l'homme, après qu'auront été épuisées toutes les voies de recours internes.

 Le respect de l'Institution ne doit pas se confondre avec une crainte révérencielle, laquelle n'a pas lieu d'être, spécialement lorsque le dysfonctionnement est manifeste, comme en l'espèce. L'article 15 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen du 26 Août 1789 (DDH), qui a pleine valeur constitutionnelle, en atteste: "La Société a le droit de demander compte à tout agent public de son administration."

 La création d'une commission d'enquête parlementaire (article 15 DDH et article 6 de l'ordonnance du 17 Novembre 1958 sur le fonctionnement des assemblées parlementaires) que nous allons prochainement demander, me semble, sous cet angle, particulièrement opportune.

Exercer cette action citoyenne inédite dans l'histoire de la République, comme vous l'avez fait courageusement, - qui procède du droit de résistance à l'oppression (art. 2 DDH) et de la garantie des droits (art. 16 DDH) - relève, dès lors, de la conscience de chacun: la démocratie aurait-elle un sens si celui chargé de faire respecter les principes constitutionnels ne se les appliquait pas à lui-même?

 Merci Maître.

Si vous souhaitez poser d'autres questions à Maître Philippe KRIKORIAN, écrivez-nous à haybachdban@wanadoo.fr

Canard Enchaîné du 15.02.2012

 Western Armenia News

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