Notre peuple est en danger
Faudra- t-il attendre sans arrêt des catastrophes pour voir
les arméniens se rassembler et faire bloc ?
Notre histoire est jalonnée de faits dramatiques
« fédérateurs » et il est malgré tout très étonnant que nous
ayons besoin de ces situations d’urgence pour coaliser nos
forces et rassembler nos individualités. Face à l’adversité,
face au danger d’anéantissement, nos consciences se
réveillent, un sursaut de sentiment d’arménité s’ébranle.
Ce fut le cas pour la guerre du Kharabagh, mais aussi lors
du tremblement de terre en 1988.
Oui, ce sont de grandes causes qui mettent en péril des
milliers de personnes qui réveillent nos consciences mais
une vie humaine ne vaut pas qu’on mette en place nos forces
pour lutter et faire en sorte qu’on vienne en aide à cette
personne ? Apparemment non !
Un monsieur arrive d’Arménie dans des conditions
dramatiques, sans papiers dans un état de santé extrêmement
grave, il est hospitalisé d’urgence dans un hôpital de la
banlieue parisienne, les médecins font appel à l’interprète
identifié sur l’hôpital qui parle arménien et qui peut
traduire les quelques mots qui vont permettre de rentrer en
contact avec ce patient et là, le long parcours commence,
une descente aux enfers pour le traducteur qui est un
compatriote avant d’être interprète. Pour peu qu’il ait une
conscience et quelques sentiments la suite ne se fait pas
attendre, on rentre à pieds joints dans l’émotionnel et la
distance nécessaire qui protège le médecin de son patient
est gommée, on est dans une autre dimension : notre patient
est notre compatriote, on parle avec la famille au téléphone
qui est à Erevan, on écoute, on rassure, on cherche des
solutions :
On pense faire venir la femme près de son mari dont l’état
s’aggrave de jour en jour, on devient la personne de
confiance pour le personnel médical et il faut prendre des
décisions, on est seul avec un cas de conscience alors on
appelle les associations arméniennes qui se prétendent de
bienfaisance pour au moins amoindrir les difficultés
matérielles ! Quelle duperie !! Ce n’est pas leur
problème !!!
L’AAAS, l’UGAB, la MCA, (pour ne pas les nommer !) eh bien
non décidément ce cas n’intéresse personne, alors on fait
intervenir l’assistante sociale du service en se disant
qu’elle aura plus de diplomatie, que c’est son métier,
qu’elle parlera professionnel et pas émotionnel, là encore
les mêmes réponses !! Et le patient se meurt davantage de
jour en jour, son état se dégrade, il appelle la nuit sur
notre portable pour entendre parler arménien parce qu’il a
mal et qu’il a peur.
Lecteur, mettez vous 2 secondes à la place du médecin
arménien, 2 secondes pas plus, que faites vous ? Donnez-moi
des réponses, des solutions, s’il vous plait ! Je vous
rassure vous ne risquez plus rien le patient est décédé !
Il est décédé dignement grâce à une poignée de personnes qui
se sentent arméniennes dans toutes les circonstances et pas
seulement dans les situations où ils feront la une de
l’actualité. Un Vartabed comme on les aime, des arméniens
anonymes animés d’un sentiment d’arménité ont fait en sorte
que ce monsieur décédé sans souffrance à l’hôpital a eu les
derniers sacrements, une messe, et un cercueil qui l’a
ramené auprès des siens en Arménie…
Toute vie humaine est une richesse, un trésor qu’il faut
préserver, notre devoir d’être humain est d’aider celui qui
est affaibli, nul n’est à l’abri de la maladie, de
l’isolement, nous serons un jour ou l’autre confronté à la
mort, peut on rester insensible à la détresse de nos
semblables ? Au lieu de placer notre énergie dans des
associations inutiles et poussiéreuses qui ne font que tirer
des bénéfices de nos compatriotes, qui empochent des sommes
exorbitantes sans venir en aide aux plus miséreux alors que
c’est leur but déclaré dans leurs statuts, nous ferions
mieux de rassembler nos forces, nous organiser pour pouvoir
faire face à ces situations d’urgence qui vont devenir de
plus en plus courantes puisque l’Arménie produit et favorise
la fuite de ses habitants.
Ce patient, comme ceux qui vont suivre, souligne notre
manque de cohésion, nos faiblesses. Il faut nous organiser,
pouvoir répondre rapidement à des demandes d’aide de
logement, médical. Notre peuple doit survivre malgré les
difficultés. Nous avons un passé historique qui remonte dans
la nuit des temps, une culture d’une richesse incomparable,
nous avons survécu à des plans d’extermination, nous devons
continuer à nous battre et à aider les nôtres qu’un
gouvernement vil et abject veut faire disparaitre. En nous
taisant et en refusant de les aider nous cautionnons cette
politique anti Hay et nous l’acceptons. Ces gouvernants ne
sont pas arméniens, vous vous l’êtes, moi je le suis,
montrons leur que nous existons et que nous ne laisserons
pas faire, que nous ferons bloc contre eux.
Notre peuple est en danger cela devrait suffire à vous faire
réagir, c’est un réel danger qui menace notre nation, un
danger d’anéantissement et de disparition, il ne suffit pas
d’aller vous rassembler le 24 avril pour défiler dans les
rues et vous sentir arménien pendant 2 heures, ou aller dans
un restaurant arménien le temps d’une soirée pour vous
régaler de spécialités qui fleurent bon le pays dans une
ambiance musicale qui fait vibrer votre cœur, fouler le sol
de l’Arménie et jouer les touristes pendant une dizaine de
jours en vous croyant chez vous ! Chacun peut apporter une
aide à son niveau c’est surtout le rassemblement de toutes
ces forces , un bloc soudé, animé d’un même sentiment d’être
arménien et de vouloir aider les siens qui pourra mettre en
péril et faire capoter une politique mafieuse qui agit
contre les intérêts de notre peuple.
Séta Sopoglian Mardoyan, responsable du département santé au
CNA.
Western Armenia News